Comment en est-on arrivé là ? Comment l'extrême droite a-t-elle pu arriver aux portes du pouvoir, ou s'y trouver déjà, dans toute l'Europe ? Telle est, dans sa terrible simplicité, la question stratégique, que pose le philosophe Ernst Bloch quand, à Zurich, en exil, il publie en 1935 Héritage de ce temps . Comment les forces de progrès qui portaient les espérances de l'utopie, ont-elles pu se laisser ainsi écraser par les idéologies totalitaires, réactionnaires, conservatrices ? Comment cet échec, ce désastre, qu'il faudrait expliquer, peut-il laisser, malgré tout, un héritage ? Telle est l'ambition d'une œuvre paradoxale et critique, au sens plein du terme, qui tente de faire dans la culture de l'époque le partage entre le sain et le corrompu et qui entend recueillir son héritage « sous bénéfice d'inventaire ».
En vue de cet examen, Ernst Bloch invente le concept de noncontemporanéité. « Tous ne sont pas présents dans le même temps… Des temps plus anciens que ceux d'aujourd'hui continuent à vivre dans des conditions plus anciennes. » La question de l'héritage devient celle de la contre-attaque.
Presse
Ernst Bloch expose sa thèse avec une précision mécanique, horlogère, par l'agencement minutieux de courts articles, d’essais et de « conclusions provisoires » écrits pour la plupart entre 1930 et 1935.
- 28/03/2018
Biographies Contributeurs
Ernst Bloch
Ernst Bloch (1885-1977) a très tôt adhéré au socialisme et a fait campagne contre le militarisme prussien. En 1915, il part pour la Suisse où, pendant toute la guerre, il défend des positions anti-impérialistes. Rentré en Allemagne, il publie en 1918 L'Esprit de l'utopie, un des grands livres du marxisme non orthodoxe. En 1922, il publie sa thèse consacrée à Thomas Munzer. Il attaque de plus en plus violemment le nazisme et publie en 1935 L'Héritage de ce temps, ouvertement antinazi. Déchu de la nationalité allemande et exposé aux persécutions antisémites, il quitte l'Allemagne et part pour New York. À la fin de la guerre, il revient en Europe, en Allemagne de l'Est, et occupe la chaire KarlMarx à l'université de Leipzig. Il commence à faire paraître son opus magnum, Le Principe espérance (trois tomes, 1954-1959). D'abord salué par les autorités de la RDA, il est ensuite accusé de professer un marxisme hérétique et de « corrompre la jeunesse ». En 1961, il quitte la RDA et achève sa carrière à l'université de Tübingen.
Consulter la table des matières
Préface de Jean Lacoste : Sous bénéfice d'inventaire
Avant-propos à l'édition de 1935
Post-scriptum de 1962
LA POUSSIÈRE
À demi
Odeur de moisi
Les ragots
Les yeux qui trahissent
De loin et de près
Le toc écrivain
Inconsistant
PREMIÈRE PARTIE EMPLOYÉS ET DISTRACTION
L'homme faible
Les faux-cols
Petite ville (1924)
Milieu artificiel (1929)
L'homme brillant au cinéma
En feuilleton
350 table des matières Une victoire du magazine (1929)
L'apparence prend la plume
Succédané et nouveauté
DEUXIÈME PARTIE NON-CONTEMPORANÉITÉ ET ENIVREMENT
Les obscurs
Bond en arrière
Rage et hilarité
Saxons sans forêt
Nuit de chahut à la ville et à la campagne
Amusement Co., horreur, et Troisième Reich
Inventaire de l'apparence révolutionnaire
Nouvelle morale servile du journal
Fête des bateleurs au pied du gibet
Histoire de la grande dilapidation
Théorie raciale du Vormärz
Le mythe de l'Allemagne et les puissances médicales
transition en forme de résumé : la non-contemporanéité et le devoir de la rendre dialectique
A. État premier
B. Non-contemporanéités racontées
C. Non-contemporanéité et contemporanéité, d'un point de vue philosophique
Arriération authentiquement non-contemporaine
Nature logique des contradictions non-contemporaines
Le problème d'une dialectique à plusieurs niveaux
D. Sur l'histoire originale du Troisième Reich
Le libérateur futur
L'Évangile d'ici-bas
Le millénarisme ou la terre comme paradis
Bilan pour une partie de la pratique concrètement utopique
E. Le Ciel sur Terre et non les Enfers
Rationalisme et sagesse dialectique simultanés
Exemples de la métamorphose
Souvenir : la force d'Hitler
conclusion : failles romantiques
La fugue colorée
Sur le conte, le roman de colportage et la légende
Le petit poucet
La carabine d'argent de Winnetou
Illusion onirique, foire et roman de colportage
Le jeu géant comme légende
Paganisme et fantastique occulte
Frisson appris
Science drolatique
L'épicerie du mystère comme grande entreprise
Qualité cachée
Chants de l'exil
Attrape empoisonnée
TROISIÈME PARTIE GRANDE BOURGEOISIE, OBJECTIVITÉ ET MONTAGE
La secousse
Nouvelle fenêtre d'angle
Ludwigshafen et Mannheim
Transition : Berlin, fonctions dans le vide
L'élan
Objectivité, du point de vue immédiat
Objectivité, du point de vue médiat
Montage, d'un point de vue immédiat
Une nouvelle fois le montage, au niveau supérieur
Montage, de façon médiate
Le vide
L'immeuble-navire
Sur l'opéra de Quat'sous
Stravinski, écho du temps
Romans de la bizarrerie et théâtre de montage
Un léniniste du théâtre (1938)
L'expressionnisme, vu aujourd'hui (1937)
Discussions sur l'expressionnisme (1938)
Encore une fois le problème de l'expressionnisme (1940)
Relativismes et montage à vide
L'œil
Les fictifs
Les empiristes
Relativisme lâche, social et physique
Réflexions sociales
Relativisme en physique
Provision de la phénoménologie
« Ontologies » de la plénitude et de la précarité
Éclairement de l'existence et intuition des symboles « à travers l'être-là »
Le tribut que la vertu paye au vice
Appendice : les bêtes de proie de Spengler et les jardins relatifs de la culture
Philosophies de l'inquiétude, du processus, de Dionysos
L'ivresse intelligente
La moucheture du flux primordial
Romantisme diluvial
L'imago comme illusion venue des « profondeurs »
L'élan vital de Bergson
L'impulsion Nietzsche
Surréalismes pensants
La main complice
La forme de la revue dans la philosophie
Wagner sauvé par le roman de colportage surréaliste
Hiéroglyphes du xixe siècle
De nombreuses chambres dans la maison du monde
Traverse d'aujourd'hui : la peur du « chaos »
Le drapeau rouge et or
Foi sans mensonge
Index des noms