Études anglaises - N°4/2014
Text and Music in Early Modern England
- 128 pages
- Livre broché
- 15 x 23 cm
- Études anglaises
- Parution : 20/02/2015
- CLIL : 3439
- EAN13 : 9782252039298
- Code distributeur : 47936
Présentation
Natalie ROULON
Music and Gender in All's Well That Ends Well
All’s Well That Ends Well may not be the most musical of Shakespeare’s works, but the music performed or referred to in the play is important in that it contributes to constructing the strict gender divide which prevailed in the society whose tensions this "problem comedy" reflects. Masculine music is martial, self-centred, and tends to reveal the principal male characters’ anxieties about feminine desire. Although the female characters are not presented as musicians, in many productions they are accompanied by soft stringed instruments when they appear onstage. Helen is associated with music in male discourse and is cast as the play’s main, albeit paradoxical, harmonising figure. Whereas the King of France’s male physicians have failed to restore his health, Helen successfully devises a musical cure for him and is therefore granted her request to choose Bertram for her husband. However, in spite of the immense power Shakespeare has endowed her with, this Orphic woman comes up against a patriarchal structure which leaves limited scope for female agency and gender reversal, hence the lingering doubts, even once the play has ended, as to her ability to attain unalloyed marital bliss.
Bien que All’s Well That Ends Well ne soit pas la plus musicale des œuvres de Shakespeare, la musique qui y est interprétée où à laquelle il est fait référence est importante dans la mesure où elle contribue à la construction de la division des genres qui prévalait dans la société dont les tensions se trouvent reflétées dans cette problem comedy. La musique des hommes est martiale et narcissique et tend à -mettre au jour l’angoisse qu’éprouvent les principaux personnages masculins à l’endroit du désir féminin. Bien que les figures féminines ne soient pas présentées sous les traits de musiciennes, leur présence est accompagnée d’une suave musique pour cordes dans bien des mises en scène. Helen est associée à la musique dans le discours masculin et son rôle, quoique paradoxal, est celui de la grande figure harmonisante de la pièce. Tandis que les médecins du roi de France ont échoué à le guérir, Helen met au point une thérapie musicale qui atteint son but, aussi se voit-elle accorder sa requête de faire de Bertram son époux. Cependant, en dépit des immenses prérogatives que Shakespeare lui a conférées, cette femme orphique se heurte à une structure patriarcale qui ne s’accommode vraiment ni du pouvoir féminin ni de l’inversion des rôles sexuels, d’où une incertitude persistante, une fois la pièce achevée, quant à sa capacité à accéder à une parfaite félicité conjugale.
Anne-Marie MILLER-BLAISE
Ardelia’s Voice: Anne Kingsmill Finch and the (Female) Lyrical Moment
Anne Kingsmill Finch’s most probable authorship of the libretto to the first through-sung English opera, John Blow’s Venus and Adonis, does not only elucidate one of the mysteries of the history of music. Considered alongside Finch’s other dramatic works, it reverberates on the way the Countess of Winchilsea shapes her own voice in her lyric poetry, thought of in terms of performance. Finch’s engagement with Restoration music helps to account for the tension later at work in her poems between gendered song and speech. It may also explain why she has often been misconstrued as a pre-Romantic poet.
L’attribution probable du livret du premier véritable opéra anglais, le Vénus et Adonis de John Blow, à Anne Kingsmill Finch ne résout pas seulement l’un des petits mystères de l’histoire de la musique. Ce texte, lorsque lu parallèlement aux autres œuvres dramatiques de Finch, éclaire d’un nouveau jour la manière particulière dont la comtesse de Winchilsea façonne sa voix, pensée comme performance, dans sa poésie lyrique. L’implication de Finch dans le domaine musical à la Restauration permet de mettre en lumière la tension qui existe plus tard dans sa poésie entre la parole et le chant, tous deux sexués. Elle élucide peut-être aussi les raisons pour lesquelles Finch a souvent été considérée à tort comme un poète préromantique.
Pierre DEGOTT
Variations on a Reflexive Theme: the Musical Adaptations of A Midsummer Night’s Dream (1692-1763)
This paper focuses on the many rewritings of A Midsummer Night’s Dream in the long eighteenth century. It mainly analyses the way reflexive discourse on drama gave way, in a whole spectrum of generic hybrids, to a form of “meta-operatic” discourse dealing with the place of opera on the English stage. If Purcell’s The Fairy Queen (1692) celebrates the all-powerful place of music to the point that it actually stages the symbolic dismissal of the poet, Richard Leveridge’s adaptations of the play-within-the-play (1716, 1745) signal the generic upheavals brought about by the advent of Italian opera in the 1710s. David Garrick’s later adaptations testify to the difficulty of restoring Shakespeare’s text by purging it from the Italian influences still pervading native genres.
Cet article se penche sur les multiples réécritures du Songe du nuit d’été au cours du long XVIIIe siècle. Il s’intéresse notamment à la manière dont le discours réflexif sur le théâtre a été transformé, dans une série d’adaptations toutes hybrides génériquement, en un discours « méta-opératique » traitant à un degré ou un autre de la place de l’opéra sur la scène théâtrale britannique. Ainsi, si The Fairy Queen (1692) de Purcell semble thématiser la toute puissance de la musique, jusqu’à mettre en scène la disparition du poète, l’adaptation par Richard Leveridge de la célèbre pièce-dans-la-pièce (1716, 1745) signale, dans un contexte marqué par l’apparition de l’opéra italien à Londres, un profond bouleversement dans les catégories théâtrales. Plus tard, les réécritures de David Garrick attestent la difficulté à « restaurer » le texte shakespearien et à purger le texte des influences italiennes qui continuent à s’infiltrer dans les répertoires dits autochtones.
Sabine VOLK-BIRKE
Context as Text: Milton’s Psalms in Handel’s and Hamilton’s Occasional Oratorio
The relation between music and text in Handel’s oratorios is a complex one, in which religion and politics interact with each other. This is particularly the case in the Occasional Oratorio, which was written while the Duke of Cumberland was fighting the Jacobite Rebellion of 1745/46, as the English believed the Hanoverian succession, the Anglican Church, and the constitution to be in grave danger. A significant part of Newburgh Hamilton’s libretto consists of Milton’s metrical translations of selected psalms. This paper looks at the politics and the aesthetics of Milton’s psalms 1-8, comparing 1653, the date of their composition, with the political situation in 1746. It analyses the way in which Hamilton dealt with Milton’s poetry/prayers, choosing, re-arranging and combining them into a new (dramatic) genre, which served as the basis for Handel’s music. I argue that the contexts of the libretto and the occasion of the composition constitute an integral part of the whole multi-layered aesthetic and emotional experience of the performance, so that all these elements need to be taken into account when we want to understand what a contemporary audience may have heard and read, remembered and associated.
Les liens entre musique et texte dans les oratorios de Haendel est complexe car religion et politique y interagissent de façon réciproque. C’est tout particulièrement le cas dans le Occasional Oratorio (Oratorio “de circonstance”), écrit alors que le duc de Cumberland combattait la rébellion jacobite de 1745-46 et que les Anglais craignaient que la succession de Hanovre, l’Église d’Angleterre et la constitution ne fussent sérieusement menacés. Une partie importante du livret de Newburgh Hamilton est fondée sur la traduction métrique par Milton de psaumes choisis. Le présent article étudie les aspects politiques et esthétiques des psaumes 1-8 de Milton en effectuant une comparaison entre la date de leur composition, 1653, et la situation politique de 1746. Il analyse la façon selon laquelle Hamilton s’attacha à traiter la poésie ou les prières de Milton en les choisissant, les réarrangeant et les combinant afin de constituer un nouveau genre (dramatique) qui servit de support à la musique de Haendel. Le contexte du livret et les circonstances de la composition constituent une partie intégrante de l’expérience complexe, émotive et esthétique, de la représentation de l’œuvre de sorte que tous ces éléments doivent être pris en compte si l’on veut essayer de comprendre ce que le public de l’époque pouvait entendre, lire, se rappeler et mettre en relation.
Pierre DUBOIS
Music and the Feminine Sublime in Ann Radcliffe’s Mysteries of Udolpho
In The Mysteries of Udolpho (1794), by Ann Radcliffe, music performs a crucial role to represent psychological states. This paper argues that Radcliffe did not pit the beautiful against the sublime as radically and systematically as Edmund Burke had done in his Enquiry. The sublime cannot be restricted to the feeling of terror: one also finds a positive form of sublime resulting from what it is impossible for the mind to grasp. In Radcliffe’s novels, music often appears in conjunction with the perception by the heroine of particularly intense natural beauties; it also intervenes in scenes of perfect bliss and harmony, or in scenes of revelation, where the mind is overwhelmed by a sense of something almost sacred. Thus if music belongs to the (feminine) category of the beautiful as it reveals the sensibility of the heroine who plays and sings gracefully, yet it paradoxically partakes of the sublime as well, as it is closely associated with nature and the unknowable. The article suggests therefore that Radcliffe used music in order to define a feminine form of the sublime
Dans The Mysteries of Udolpho (1794), d’Ann Radcliffe, la musique joue un rôle crucial dans l’évocation d’états psychologiques. Cet article essaie de montrer que Radcliffe n’oppose pas le sublime au beau de façon aussi radicale et systématique que l’avait fait Edmund Burke dans sa célèbre Enquiry. Le sublime ne peut se réduire au sentiment de terreur : on trouve aussi une forme de sublime positive qui provient de ce que l’esprit n’arrive pas à comprendre. Dans les romans de Radcliffe, la musique se manifeste souvent de façon concomitante à la perception par l’héroïne de la beauté intense de scène naturelles. Elle intervient aussi dans des scènes de plénitude et d’harmonie, ou dans des scènes de révélation où l’âme est submergée par un sentiment quasiment sacré. Ainsi la musique appartient à la catégorie (féminine) du beau en ce qu’elle révèle la sensibilité de l’héroïne qui joue et chante avec délicatesse, mais paradoxalement elle participe aussi du sublime en ce qu’elle est associée à la nature et à l’ineffable. L’article suggère donc que Radcliffe a recours à la musique afin de définir une forme féminine du sublime.
Claire TÉCHÉNÉ
Musical Descriptions and Sensations: the Presence of Music in English Romantic Poetry
This paper examines a few characteristic examples of how the musical lexical field and auditory sensations at large are treated by the main English Romantic poets in the context of a renewed confidence in subjective perception. It aims at showing that musical sensations are part of the Romantic vision of the world (nostalgia for a forsaken harmony, quest for a transparent meaning) and that music stands both as a paradigm and a counter-model for poetic expression.
Cet article se propose d’étudier les modalités de l’utilisation du champ lexical de la musique et des sensations auditives à travers quelques exemples de l’œuvre des principaux poètes romantiques anglais. Il s’agit de montrer que le traitement de la sensation musicale témoigne du rapport romantique au monde (nostalgie de l’harmonie, confiance accordée à la subjectivité) ainsi que d’une vision de la musique comme double à la fois envié et repoussé de l’expression poétique.
Biographies Contributeurs
Alexis Tadié
Professeur d'anglais à l'Université Paris 7-Denis Diderot (en 2003) ; Directeur de la Maison française d'Oxford et Fellow de St-Catherine's College à Oxford (en 2005)